Sensibiliser à la culture sourde et développer la LSF en bibliothèque

À l’occasion de la Journée mondiale des Sourds, la Bibliothèque publique d’information (Bpi) partage ses ressources et réflexions en cours sur la langue des signes française (LSF) en bibliothèque et la culture sourde.

La sensibilisation à la culture sourde et à la LSF, partie intégrante des missions des bibliothèques

Marginalisée, la langue des signes est reconnue comme une langue à part entière dans les années 1980, grâce au mouvement sourd qui s’organise et aux travaux de chercheurs en linguistique et en sociologie tels que Christian Cuxac et Bernard Mottez. Cette réhabilitation de la LSF et la reconnaissance de la culture sourde qui y est rattachée porte le nom de « Réveil Sourd ».

Ce réveil aboutit à la reconnaissance de la langue des signes en France « comme une langue à part entière » par la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées (Art. 75, Art. L. 312-9-1) :
« Tout élève concerné doit pouvoir recevoir un enseignement de la langue des signes française ».

Lors de la 6e Conférence nationale du handicap (CNH, mise en place par la loi du 11 février 2005) du 26 avril 2023, le gouvernement a pris dix engagements en faveur des publics en situation de handicap, notamment « le respect des obligations d’accessibilité des établissements recevant du public » et « l’accessibilité physique et numérique des services publics ».

Ces mesures engagent ainsi les bibliothèques à améliorer leur accessibilité et leur inclusivité pour les personnes présentant certains handicaps (visuels, auditifs, physiques…). La sensibilisation à la culture sourde en constitue un levier important : on compte en France 300 000 Sourds profonds, dont un tiers pratique couramment la langue des signes.

Trois niveaux possibles dans ce travail de sensibilisation pour et par les personnels des bibliothèques

Depuis de longues années, des bibliothèques et réseaux se sont engagés dans la sensibilisation à la culture sourde et à la LSF. Par exemple, la ville de Paris possède cinq bibliothèques labellisées « pôle sourd ». Les personnels de ces établissements sont formés et/ou eux-mêmes sourds ou malentendants, et peuvent accueillir le public en LSF. Ces bibliothèques proposent régulièrement des animations accessibles pour les sourds et malentendants ainsi que des collections dédiées au monde des Sourds.

Ce travail d’inclusion de la culture sourde dans sa bibliothèque peut se faire par étapes, en fonction des moyens dont on dispose, de la mise à disposition de ressources au développement de médiations spécifiques.

Sensibiliser à la culture sourde

Dans un premier temps, les bibliothèques peuvent sensibiliser à la LSF et à la culture sourde grâce à un panel de ressources :

  • Des ressources d’autoformation et des ouvrages pour découvrir la langue des signes française. La Bpi propose une bibliographie complète sur le sujet.
  • Des collections dédiées au monde des Sourds et plus largement à la question du handicap. La Bpi possède un fonds spécifique intitulé Sociologie du handicap. De son côté, la bibliothèque de la Canopée utilise un pictogramme pour identifier visuellement les ouvrages relatifs ou rattachables à la culture sourde qui sont intégrés au reste des collections.
  • Une cartographie de son environnement associatif et institutionnel : ces lieux ressources, qui peuvent être indiqués aux publics, seront aussi de précieux interlocuteurs et des partenaires indispensables pour développer un accueil et une médiation de qualité.
Présentation d'ouvrages pour apprendre la LSF
© Louise Suszek / Bpi

Apprendre à signer pour mieux accueillir

Dans un second temps, les bibliothèques peuvent proposer aux personnels de se former aux bases de la LSF grâce à différents outils :

  • Les sites d’autoformation en ligne auxquels de nombreuses bibliothèques sont abonnés. La Bpi met à disposition des plateformes de tutoriels accessibles à tous à distance.
  • Des formations en interne avec des ateliers de conversation : la Bpi a mobilisé un groupe d’une dizaine de volontaires, sous l’impulsion d’une collègue sourde et d’une collègue entendante. Cette initiative a permis de découvrir et d’encourager des collègues signeurs parmi les équipes.
  • Des organismes spécialisés proposent une offre de stages ou de cours par niveau, comme l’IVT – International Visual Theatre.

Si l’on peut partir sur une base de volontariat, il est nécessaire à terme d’institutionnaliser ce système, afin de pouvoir pérenniser un service d’accueil de base en LSF.

Développer une médiation inclusive

Dans un troisième temps, les bibliothèques peuvent proposer une programmation la plus inclusive possible, en s’appuyant sur l’expertise et la formation des équipes, des partenaires et des lieux ressources :

capture d'écran d'une rencontre en langue des signes francaises
visite virtuelle en langue des signes française de l'exposition catherine Meurisse

Sensibiliser à la culture sourde et développer la LSF en bibliothèque est ainsi un travail collectif et inclusif, au sein même des équipes. Il est en effet essentiel que l’ensemble de ces actions (formation, ateliers, médiations) soient portées par des personnes concernées, sourdes ou malentendantes.

Publié le 22/09/2023 - CC BY-SA 4.0

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Laurence
Laurence
9 heures il y a

WoOoh cet article est d’une richesse incroyable !
Je ne cesse de rebondir d’une info à l’autre, d’aller d’une site à l’autre pour en savoir plus sur la LSF malheureusement si coûteuse à apprendre (n’est-ce pas là – aussi – un frein au développement de cette langue ?).
1000 mercis