F for Fake
d'Orson Welles

Sortie en salles le mercredi 8 février 2023.

Avec F for Fake, Orson Welles a réalisé un film essai sur la vérité et le mensonge, notamment dans l’art, entremêlant les portraits du peintre faussaire Elmyr de Hory, de la belle actrice Oja Kodar, ou du faux biographe Clifford Irving, saisis sous le soleil d’Ibiza, dans un montage nerveux, sexy et plein d’humour. 

Photo du documentaire F for Fake.
Orson Welles dans F for fake © Potemkine Films.

L’avis du bibliothécaire

Orson Welles

En 1973, Orson Welles a 58 ans et une brillante carrière d’acteur et de réalisateur derrière lui. Il a par exemple joué dans Le Troisième homme de Carol Reed et signé des films tels que Citizen Kane en 1941, La Dame de Shanghai en 1947 ou La Soif du mal en 1958. Dans les douze dernières années qui lui restent à vivre, il n’achèvera que deux films, deux documentaires : F for Fake en 1973 et Filming Othello en 1978.

Genèse du film

Le matériau de base de F for Fake consiste en un portrait d’Elmyr de Hory tourné à Ibiza au début des années 70 par le réalisateur François Reichenbach. On y voit le faussaire peindre, raconter sa vie, recevoir la jet set dans sa belle villa dominant la mer. On y rencontre aussi son biographe, Clifford Irving, par ailleurs auteur d’une fausse biographie du milliardaire américain Howard Hughes.

Sur ce noyau, Orson Welles a greffé de nouvelles images qu’il a fait tourner par Reichenbach en tant que directeur de la photographie : Welles habillé en magicien faisant des tours de magie à un enfant, gare d’Austerlitz à Paris ; sa compagne de l’époque, la belle actrice hungaro-croate Oja Kodar, déambulant en minijupe dans un pseudo-documentaire sur le voyeurisme de rue ; l’univers d’Howard Hughes à Las Vegas ; la cathédrale de Chartres, témoignage du génie artistique humain et pourtant œuvre collective non signée… Il filme aussi une histoire qui aurait eu lieu entre Oja Kodar et Picasso. 

Kaléidoscope

C’est un film de montage. Les séquences, les photos au banc-titre, les arrêts sur image s’imbriquent, se mêlent, se répondent en un kaléidoscope haché. L’ensemble est lié par des monologues ou des dialogues pleins de verve, portés par les voix ironiques, mais sous contrôle, d’Elmyr de Hory et de Clifford Irving, ou par la voix chaude et grave d’Orson Welles. La musique a été composée par Michel Legrand.

Joie de vivre

Comme Orson Welles a laissé plusieurs œuvres inachevées dans sa carrière, le montage alambiqué de ce film aurait pu accoucher d’un résultat brouillon et velléitaire, et pourtant non, F for Fake est une réflexion sur le mensonge, mais surtout, une réflexion pleine d’humour, de provocation et d’érotisme, malgré la disparition, quelques années plus tard, du protagoniste Elmyr de Hory qui se suicidera pour éviter la prison.

Orson Welles décrit la vie comme un jeu, avec ses déboires, ses tricheries, ses soirées mondaines hantées de femmes mystérieuses et de beaux-parleurs, ses milliardaires gagnés par la folie, ses peintres qui, armés d’un pinceau, transmutent des pigments de couleur en or, comme autant de métaphores de son métier de cinéaste.

Une certaine joie de vivre ressort de ce film qui fait se côtoyer à l’écran différentes expressions de la beauté : sa compagne marchant dans la rue, la cathédrale de Chartres dressée dans la brume, des tableaux peints par Picasso ou par de talentueux faussaires. Une certaine joie de vivre transparait dès le début du film dans la scène où Orson Welles fait disparaitre une clé sous les yeux rieurs d’un enfant et les yeux non moins rieurs de la belle Oja Kodar. F for Fake, avant-dernier film de Orson Welles, comme un testament de légèreté d’un homme à la stature de taureau, d’un raconteur d’histoires, qui, toute sa vie, chassa la mélancolie par la fréquentation de rêveurs, d’illusionnistes, et de troublantes beautés terrestres.

Jacques Puy

Bande annonce

Rappel

F for Fake – Réalisation : Orson Welles – 1973 – 1 h 28 min – Production : Les Films de l’Astrophore – Distribution : Potemkine Films

Publié le 06/02/2023 - CC BY-SA 4.0

En tête à tête avec Orson : conversations entre Orson Welles et Henry Jaglom

Welles, Orson (1915-1985)
Robert Laffont, 2015

De 1983 à 1985, dans l’optique de rédiger une biographie, Henry Jaglom enregistrait ses conversations avec son ami Orson Welles. Le portrait du cinéaste se dessine au fil de ces discussions sur des sujets très variés. ©Electre 2015

791.6 WELL 1

0 0 votes
Article Rating
S’abonner
Notifier de
guest
0 Commentaires
Inline Feedbacks
View all comments