Appartient au dossier : Confinements et continuité du service

Sous les écrans… le confinement

Depuis le premier confinement, les périodes se sont succédé entre reprise, congés d’été, rentrée, reconfinement. Dans ce contexte, les bibliothèques ont dû sans cesse s’adapter et repenser à la fois le calendrier et l’esprit même des actions à mener dans leurs espaces et en ligne. Comment, dans de telles conditions, garder le lien avec ses publics et maintenir la diffusion de films documentaires ?

Salle de cinéma vide
©Plamen Peychev pour Stocklib

Un Mois du film documentaire bouleversé

La veille du confinement, la soirée d’ouverture de ce rendez-vous incontournable était retransmise depuis le Centre Pompidou dans une dizaine de structures culturelles en France et dans le monde, ainsi que sur le web. Un événement hybride inédit qui donnait le ton exceptionnel de cette édition. L’association Images en bibliothèques qui coordonne l’événement au niveau national a dû trouver des alternatives aux traditionnelles projections publiques. Décidée à maintenir coûte que coûte l’édition 2020, elle s’est livrée, depuis des mois, à une véritable enquête sur les manières de montrer les films numériquement. Très réactive, l’équipe a ainsi proposé dès la rentrée de septembre un cycle de réunions pour guider les bibliothèques et les orienter vers ces solutions avec des partenaires comme Images de la Culture (CNC), Les yeux doc (Bpi), Tënk ou la 25ème heure. À partir d’octobre, des visioconférences hebdomadaires ont permis aux bibliothèques de s’informer et surtout d’échanger entre elles des informations précieuses : un succès inattendu avec, chaque fois, une quinzaine de collègues connectés. Cette année, l’édition s’étire exceptionnellement jusque fin décembre afin de donner davantage de temps aux équipes pour rebondir et s’organiser. En 2019, 2300 structures dont 900 bibliothèques avaient participé. Cette année, plus de 1500 établissements ont franchi le pas malgré la situation sanitaire chaotique. Début décembre, plus de 250 séances avaient déjà été programmées en ligne permettant ainsi aux bibliothèques de poursuivre, à distance, une partie de leurs missions.

Des projections dématérialisées pour maintenir le lien avec les publics

Dans ce contexte, le repli vers le numérique a connu une accélération bondissante faisant émerger des solutions souvent peu ou pas utilisées jusque-là par les bibliothécaires. La plupart a donc dû s’adapter et faire preuve d’imagination en un minimum de temps sans moyens supplémentaires. Pour les séances dématérialisées collectives proposées notamment par la 25e heure, ou pour des séances programmées sur les réseaux sociaux,  les droits des films qui auraient dû être projetés dans les espaces des médiathèques ont été renégociés par les structures elles-mêmes pour pouvoir être diffusées en ligne. Les sociétés de distribution ont répondu plutôt  favorablement facilitant ces séances dont le coût, au final, s’est avéré équivalent au budget initialement prévu. Les bibliothèques déjà abonnées à des plateformes de vidéo à la demande ont, quant à elles, privilégié des sélections, mettant en place par exemple des parcours thématiques semaine après semaine.

Projections en ligne collectives géolocalisées, films en lien direct sur les portails des médiathèques, rendez-vous à heure fixe, prescriptions, liens vers des ressources cinéma : que ce soit dans le cadre du mois du film documentaire ou en dehors du dispositif, les bibliothèques ont ainsi testé des formules très différentes pour préserver la relation avec les usagers éloignés, de fait, des bibliothèques. Une fois les espaces fermés, la médiation numérique a donc joué ce rôle, avec plus ou moins de succès, donnant aux collections et services numériques une place centrale. 

Diversifier l’accès aux films

Au-delà de ces propositions dont la liste est loin d’être exhaustive, les bibliothèques ont également cherché des moyens de donner accès à des ressources libres ou proposant à titre exceptionnel des diffusions gratuites. Archives, fonds privés, sociétés de productions, ont proposé des contenus en libre accès de façon continuelle, sporadique ou régulière. Promouvoir le cinéma autrement, faire découvrir de nouvelles ressources c’est ce que, Gauvain Sansépée vidéothécaire à la Médiathèque Landowski de Boulogne-Billancourt, propose depuis quelques mois sur “Cinéma libre en ligne”, où sont partagés des films proposés librement sur la toile. Si l’idée est née pendant le premier confinement, elle a, depuis, nécessité un travail de veille et de mise à jour important. Mais pour qu’une telle proposition survive, elle nécessite la contribution de plusieurs personnes, avis donc aux candidat.e.s.. À l’origine du projet ? Une rencontre organisée par Images en bibliothèques en 2016 où un intervenant présentant le projet ziklibrenbib lançait “à quand la même chose pour le cinéma ?”. Depuis, l’idée a donc fait son chemin. Des films créés sous licence libre ou tombés dans le domaine public intéressent désormais aussi de jeunes plateformes telles que Horscine qui vient de voir le jour. 

Un changement en profondeur ?

La crise n’est pas terminée et elle laissera inévitablement des traces. Car une chose est sûre, certaines expérimentations ont convaincu et d’autres germent déjà dans la tête de bibliothécaires soucieux de trouver des solutions aux problèmes soulevés par le confinement. Différentes actions peuvent aussi être envisagées dans des périodes intermédiaires : créer un blog, se réunir chez l’habitant, faire des entretiens filmés. Les idées ne manquent pas. Même si rien ne remplace la projection collective publique et les rencontres en présentiel dans les bibliothèques, certains dispositifs ont permis des échanges entre professionnels à parfois des milliers de kilomètres de distance. Reste à voir ce qui émergera de ces périodes compliquées. Quelles pratiques seront réellement adoptées par les professionnels et leurs publics ? Comment les bibliothèques les intégreront-elles entre peur et anticipation de nouvelles crises ? La coopération, le partage d’expériences et l’inventivité mis en œuvre semblent bien être les clefs pour réussir à rebondir et poursuivre les missions de service public portées au quotidien par les bibliothécaires. 

Quelques exemples :

Le Mois du film documentaire en salle virtuelle dans les bibliothèques de Reims

Une projection depuis la plateforme Les yeux doc avec tuto à la médiathèque de La Madeleine

Pour en savoir plus sur la séance hybride d’ouverture du Mois du doc

Des liens vers des ressources gratuites proposées par les bibliothécaires de Saint-Dézéry :

Plusieurs exemples de programmations sur le site d’Images en bibliothèques

Un grand merci à Alice Maitre d’Images en bibliothèques et à Gauvain Sansépée

Publié le 07/12/2020 - CC BY-SA 4.0

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