Game Girls
De Alina Skrzeszewska

Sortie en salles le mercredi 21 novembre 2018

 GAME GIRLS suit Teri et sa petite amie Tiahna dans le monde chaotique de Skid Row, quartier de Los Angeles connu pour être la “capitale des sans-abris des États-Unis.” Un dilemme attise les tensions entre les deux femmes : s’il semble que Tiahna accepte de faire partie de l’économie souterraine de Skid Row, Teri est animée par une puissante volonté d’en sortir. Avec d’autres femmes du quartier, elles participent chaque semaine à un atelier d’expression artistique, lieu de réflexion, de rêve et de guérison. Leur amour survivra-t-il à la violence de leur environnement, passé et présent ?

©Game Girls – Vendredi distribution 2018

L’Avis de la bibliothécaire

Dans la nuit, une jeune fille noire, au milieu de la rue, vocifère un torrent d’insultes et de provocations. Elle veut se battre, contre n’importe qui, contre qui veut. La colère et l’ivresse la portent. Des petits groupes, indifférents, la regarde. Elle s’éloigne, remontant son baggy. Scène ordinaire dans les rues de Skid Row, quartier de Los Angeles où vivent un grand nombre de gens pauvres, SDF, marginaux, où les dealers proposent du crystal meth.

Nous venons de faire connaissance avec Teri.

On  s’attend à un film sur la violence régnante dans ce milieu mais les scènes suivantes n’enchaînent pas dans ce registre. Alina Skrzeszewska connaît et aime le quartier. Elle y a vécu un an et demi, adolescente, en compagnie des écrits de Charles Bukowski qui a lui aussi fréquenté Skid Row et ses bars. Elle logeait  dans un hôtel style flophouse (très bon marché) de Downton. C’est là aussi qu’elle a tourné son premier long métrage documentaire, « Songs from the nickels » (2010), des portraits d’hommes marginaux.

Un projet documentaire  structuré

Un atelier artistique pour les femmes, initié par la réalisatrice, lui a permis de créer le lien nécessaire pour faire accepter le projet du film. Soutenues par une dramathérapeute, les femmes viennent  dialoguer, travaillent sur leurs émotions, et  explorent par le théâtre leurs comportements. C’est là que la cinéaste a fait la connaissance de deux jeunes filles en couple, Teri et Tiahna. Teri et sa compagne ont ainsi contribué à l’écriture en atelier de certaines séquences du film, interprétées ensuite devant la caméra.

Alina Skrzeszewska a filmé la plupart du temps seule. Sa caméra accompagne les deux femmes sans cesse en mouvement dans les rues.
L’histoire d’amour de Teri et Tiahna devient le fil conducteur du film. Teri gère les projets malgré des problèmes d’ordre psychologique. Sa volonté de les sortir de Skid Row et ses démarches nous laissent entrevoir les types de programmes sociaux pour le quartier. Un autre projet, un mariage en costumes de cérémonie, les entraine dans les préparatifs : le choix de la robe pour Tiahna et celui du costume masculin pour Teri.

Le film est dominé par la parole, celle qui circule au cours des ateliers bien sûr, celle de Teri surtout qui fait entendre sa colère, ses espoirs. Sa parole devient violente quand elle se dispute avec sa compagne ou avec un homme, plus apaisée dans une séance chez un coiffeur transsexuel où les deux voix graves entremêlent leurs points de vue sur Skid Row et sur leurs vies.

A travers le portrait des deux femmes, Alina Skrzeszewska nous fait entendre les souffrances d’une population et d’un quartier en butte à la violence : violence contre les pauvres, contre les noirs, violence de la police, de la rue, de la drogue.
Dans les premières scènes du film, on voit Teri accueillir avec effusion Tiahna à sa sortie de prison. Dans la dernière scène, c’est pour la sortie cette fois de Teri que Tiahna patiente devant la prison. « Game Girls » nous donne à voir un émouvant parcours pour rompre le cercle vicieux.

Rappel

Game Girls, de Alina Skrzeszewska

2018 – Durée 1 heure 25 min – Production Films de Force majeure – Blinker Film – Distribution Vendredi Distribution
Distinction : Grand Prix du Festival international du film indépendant de Bordeaux – Sélectionné : Section Panorama de la Berlinale 2018 (Allemagne) – Etats généraux de Lussas 2018, section Expérience du regard (France)