Atelier de conversation : le film de Bernhard Braunstein avec et pour les participants
par Emmanuelle Suné, Bpi

Dans le cadre du festival du Cinéma du réel, le samedi 25 mars 2017 à 21h au Centre Pompidou, a eu lieu la projection du film de Bernhard Braunstein, Atelier de conversation. Suivant l’un des principes de la Bpi, la séance était exceptionnellement gratuite de façon à ce que les participants aux ateliers puissent facilement y assister. Devant la salle du cinéma 1, se retrouvaient les animateurs anciens et nouveaux, les participants des ateliers et le public du festival. Tout ce petit monde était très heureux de découvrir le film tant attendu de Bernhard Braunstein.

Portrait de Bernhard Braunstein
Portrait de Bernhard Braunstein

Bernhard Braunstein et les ateliers de conversation de la Bpi

À la Bpi, les ateliers de conversation ont été créés en 2010 à l’initiative de Cécile Denier qui dirige aujourd’hui le service autoformation de la Bpi. Il s’agissait à l’époque de proposer au public de l’autoformation, et particulièrement aux apprenants de français langue étrangère, des ateliers de pratique de la langue  afin de compléter des séances d’apprentissage en autonomie sur les méthodes de langue.  Chaque semaine, un groupe d’une quinzaine de personnes se réunit donc depuis près de sept ans  pour pratiquer le français à la bibliothèque. Bernhard Braunstein faisait partie des premiers participants. Autrichien, il ne parlait pas un mot de français à son arrivée en France. Lors de sa présentation du film, il raconte comment il avait pris l’habitude de venir dans l’espace autoformation. Un jour, il voit une petite affiche sur le bureau d’information proposant des ateliers de conversation. Il s’inscrit et découvre dans une toute petite salle un groupe hétéroclite venu, comme lui, apprendre le français. Son oeil de documentariste a tout de suite repéré le potentiel de ces cafés du monde. En effet, au delà de l’aspect pédagogique, les ateliers réunissent des personnes venant du monde entier aux destins parfois extrêmement romanesques.

Un film pour raconter le monde

Pour son film, Bernhard Braunstein a choisi de mettre en avant des portraits de participants et de valoriser leur parole. Il a posé sa caméra au milieu du cercle en plan très serré sur le visage de chacun comme pour mieux capter leur parole. Le film retranscrit l’émotion qui survient parfois lors de ces ateliers : la nostalgie du pays d’origine, le sentiment de solitude, l’espoir d’une vie meilleure… Les émotions primordiales comme la joie, la tristesse, la colère, l’amour structurent le film. Ces ateliers hebdomadaires ont permis aux participants de créer des liens très forts, des amitiés qui perdurent. Au début de chaque atelier, l’animateur rappelle la règle : on ne parle qu’en français et on n’aborde pas les problèmes politiques et le sujet de la religion. Bien évidemment, cette règle est bien souvent transgressée. La politique s’invite souvent dans la discussion et suscite des débats des plus intéressants. La confrontation des points de vue de personnes venant de Syrie, des Etats-Unis, d’Inde ou  de Chine sur, par exemple, la place de la femme ou les inégalités entre les riches et les pauvres, donne à entendre un débat d’idées d’une rare richesse. Chacun s’exprime avec tolérance et respect de la position de l’autre car le cadre de l’atelier de conservation reste un espace de liberté d’expression où tous sont égaux. Les inégalités qui existent dans les pays d’origine sont ici abolies : un jeune Kurde de Turquie ayant connu la prison peut parler sans crainte avec un ancien juge turc ! Pendant la projection, le public a beaucoup ri et s’est montré très participatif.  

Réception et débat

A la fin de la projection, le réalisateur a été fortement applaudi. Lors du débat qui suivit la projection du film, l’émotion du réalisateur était palpable car il entretient un lien tout particulier avec les protagonistes. La gageure du film a été tenue : les ficelles de fabrication restent invisibles et les procédés cinématographiques permettent de rendre de façon tout à fait libre et naturelle l’émotion qui affleure lors de ces discussions entre personnes de tous âges, de toutes origines et de différentes conditions sociales, des personnes qui ne se seraient certainement jamais rencontrées en dehors de ces ateliers. Lors du débat, les questions du public ont été assez hétérogènes : des témoignages chargés d’émotions des participants et des bibliothécaires, des questions sur l’organisation des ateliers ou sur la technique cinématographique. L’épouse française de l’un des participants a également  témoigné pour souligner combien ces rendez-vous hebdomadaires ont rythmé la vie de son mari italien. Cela lui a permis de se lier d’amitié avec des personnes de tous horizons. Aujourd’hui, elle est très fière d’avoir des amis afghans, autrichiens, chinois, américains…

Atelier de Conversation,
Bernhard Braunstein
72′ / 2017 / Autriche, France, Liechtenstein

Publié le 06/04/2017

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