Fermeture, déménagement et relogement de la Bpi en 2025
entretien avec Annie Brigant, directrice adjointe de la Bpi

Inauguré en 1977, le Centre Pompidou va connaître d’importants travaux de rénovation nécessaires à son entretien et à sa modernisation. Le site sera entièrement fermé au public de 2025 à 2030. Durant cette période, la Bibliothèque publique d’information sera temporairement relogée dans l’est parisien. Annie Brigant, directrice adjointe de la Bpi, explique les étapes d’un projet historique dans la vie de l’établissement.

Pourquoi la Bpi doit-elle déménager ?

La Bpi doit déménager car le Centre Pompidou va fermer ses portes pour d’importants travaux de rénovation pendant au moins cinq ans, à partir de 2025. La question s’est posée de savoir si ces travaux pouvaient avoir lieu en site occupé, mais la durée et l’impact pour le public étaient tels qu’il était préférable de fermer complètement. Cette décision signifie un déménagement assez colossal de l’intégralité du Centre Pompidou, et donc de la Bpi.

On peut dire que c’est une étape historique dans la vie de l’établissement, de par l’ampleur de la fermeture et du projet de rénovation. L’éloignement de la « maison-mère » constitue un fort enjeu, et nous continuerons de conserver nos liens organiques avec le Centre Pompidou, notamment via la programmation culturelle. Nous retrouverons ensuite le bâtiment historique auquel nous sommes tant attachés à partir de 2030.

Où sera relogée la Bpi ?

La Bpi va être relogée dans le 12e arrondissement de Paris, dans le bâtiment Lumière, près du cours Saint-Émilion, en bord de Seine. Ce quartier a l’avantage d’être desservi par la ligne 14 du métro, qui offre un accès direct depuis la station des Halles, qui est proche du Centre Pompidou.

La bibliothèque occupera les niveaux 2 et 3 de l’aile Sud du bâtiment sur une surface de plus de 8 900 m2 ouverte au public, soit une perte d’environ 23% de la surface actuellement occupée au Centre Pompidou (10 400 m2). On va donc avoir une diminution proportionnelle de la jauge et du volume de collections. À ces espaces publics s’ajoutent les espaces internes, ateliers et bureaux, pour environ 70 agents.

La bibliothèque restera gratuite et libre d’accès, et conservera une large amplitude horaire : 12h-22h en semaine, 11h-22h les week-ends et jours fériés, fermeture les mardis.

Façade vitrée du bâtiment Lumière dans le 12ème arrondissement de Paris
© DR

Comment a été fait le choix du Lumière ?

Trouver 10 000 mètres carrés disponibles dans Paris intra-muros a été une véritable gageure. Le bâtiment Lumière a pour avantage d’offrir de vastes surfaces, entièrement rénovées par le bailleur. C’est une vraie chance d’arriver dans des espaces qui sont de très belle qualité pour accueillir notre public.

Le Lumière possède une taille (136 524 m2) presque équivalente à celle du Centre Pompidou. Notre situation ressemblera donc un peu à celle que l’on connaît aujourd’hui : nous occuperons une partie d’un très grand bâtiment partagé avec d’autres locataires (administration, bureaux d’entreprise, espaces de coworking, école de commerce, etc.) L’immense hall d’entrée permet de distribuer les différents espaces. Les deux niveaux que nous occupons dans l’aile Sud sont accessibles depuis cet atrium central. Nous menons avec le bailleur un travail sur la signalétique pour rendre la bibliothèque bien visible, faciliter le parcours du public jusqu’aux espaces de la bibliothèque, et aussi la cohabitation avec les autres occupants du bâtiment.

Le bâtiment propose également des services de restauration rapide, café, etc.

Quelles sont les grandes étapes du relogement ?

Actuellement, nous occupons déjà les locaux pour y faire des travaux. Il s’agit d’adapter des espaces de bureaux aux besoins d’une bibliothèque publique. On densifie notamment le câblage électrique et informatique pour augmenter le nombre de prises, on cloisonne certaines zones pour créer des espaces d’ateliers ou de permanences, on travaille également à l’aménagement des espaces internes qui serviront au personnel. Par ailleurs, on devra effectuer de gros travaux de menuiserie pour adapter notre mobilier à ces nouveaux espaces, plus bas de plafond et cloisonnés que les grands plateaux du Centre Pompidou. On prévoit aussi de construire des meubles sur mesure, afin d’optimiser l’espace et de pouvoir accueillir un maximum de collections et de lecteurs. Cette phase d’aménagement va durer jusqu’au mois de mars 2025.

La Bpi fermera ses portes le 2 mars 2025 au soir.

Le mois de mars sera consacré à la préparation du déménagement. Il s’agit surtout de travailler main dans la main avec les déménageurs, de leur expliquer ce qui part au Lumière, ce qui va être réemployé ou recyclé, et de tout étiqueter.

Début avril 2025 commencera le transfert, qui devrait durer jusqu’au début du mois de juin. Les personnels déménageront à la fin du mois de mai et pourront commencer à prendre possession des lieux à partir du 29 mai 2025.

Nous entamerons ensuite une période de « rodage ». Il va falloir prendre possession des espaces, vérifier que tout fonctionne, réaliser des ajustements techniques, faire passer la commission de sécurité… afin de rouvrir la Bpi au public le 25 août 2025.

Quelles conséquences de ce déménagement sur les activités de la Bpi ?

La Bpi va délocaliser une partie de ses manifestations dès le début de l’année 2025. L’action culturelle se poursuivra hors les murs, au sein de différents lieux avec lesquels nous avons noué des partenariats. Par exemple, le festival de littérature « Effractions » se tiendra en février à la Gaîté Lyrique. Les projections de films, ainsi que le festival « Cinéma du réel », seront accueillis dans d’autres cinémas, comme le Forum des images.

Les équipes travaillent également à la recherche de sites partenaires pour poursuivre, pendant la fermeture, le programme de médiations (ateliers de conversation, ateliers numériques, ateliers d’écriture ou de création, etc.) qui sont très investis par les usagers.

Au niveau des collections documentaires, c’est l’occasion pour la Bpi d’étendre l’accès à ses ressources numériques à distance. Dès le mois de novembre 2024, les usagers pourront accéder gratuitement à une trentaine de ressources numériques variées, de leur domicile et sur leurs appareils.

Comment la répartition du public qui fréquente aujourd’hui la Bpi est-elle anticipée par les autres bibliothèques ?

Les bibliothèques du territoire parisien s’interrogent, et c’est bien normal, sur la période de fermeture. La Bpi a une jauge maximale de 2 100 personnes, possède une forte amplitude horaire, avec un seul jour de fermeture hebdomadaire et un seul jour férié dans l’année, ce qui est bien plus important que la plupart des bibliothèques parisiennes. Donc, il y aura forcément un effet de compensation qui va devoir être assumé par d’autres bibliothèques. Une concertation est prévue sur ce sujet, que ce soit avec les bibliothèques de la ville de Paris, les bibliothèques universitaires, la Bibliothèque de la Cité des sciences et de l’industrie ou la BnF.

Comment envisagez-vous la répartition du public au moment de la réouverture de la Bpi ?

Il est encore difficile de se projeter sur la réouverture et une éventuelle nouvelle répartition des publics entre toutes les institutions documentaires de l’Île-de-France.

Il faudra laisser au public le temps de prendre de nouvelles habitudes, de décider si cette nouvelle Bpi provisoire correspond à ses besoins – ce que nous espérons, sachant que les réponses seront certainement très diverses selon les personnes et leur lieu de vie.

Un diagnostic de territoire, réalisé par Lewis Kerfane-Brown, étudiant en Master « Cultures de l’écrit et de l’image » à l’Enssib, a mis en évidence un fort besoin de places de lecture pour les étudiants des campus de cette zone, notamment la Sorbonne Nouvelle et les Grands Moulins. On peut donc imaginer que l’équilibre des publics, entre étudiants et non-étudiants, qui varie aujourd’hui entre 65%-70% d’étudiants, devrait rester à peu près similaire, en tenant évidemment compte de la moindre capacité d’accueil. Mais il faudra certainement attendre plusieurs mois avant de pouvoir faire des observations pertinentes.

Que sera la Bpi 2030 ?

Le projet Centre 2030 est une chance historique, car il permet de revoir entièrement l’agencement de l’ensemble des surfaces de la bibliothèque, augmentées de plus de 2 000 mètres carrés. Nous travaillons avec l’équipe d’architectes Moreau-Kusunoki accompagnés de Frida Escobedo, qui ont été retenus au printemps dernier au terme d‘un concours lancé par le Centre Pompidou.

Projet d’aménagement intérieur de la Bpi 2030
Bpi 2030 © Moreau Kusunoki en association avec Frida Escobedo Studio

L’une des grandes nouveautés du projet Centre 2030, c’est qu’il intègre un pôle jeunesse, commun à la Bpi et au Centre. Les équipes animeront conjointement cet espace, qui sera ouvert aux tout-petits, aux enfants, aux adolescents et aux jeunes adultes. La Bpi va ainsi réinvestir le champ des 6-11 ans, et d’une certaine manière, renouer avec ses origines, car elle comportait une bibliothèque jeunesse à son ouverture en 1977.

L’art occupera également une place prépondérante, signe de la place centrale de la Bpi au sein du Centre Pompidou. La bibliothèque va vraiment devenir une étape, de façon beaucoup plus forte encore qu’aujourd’hui, sur le parcours des visiteurs du Centre. Cette place de l’art sera incarnée par un dispositif qui va mêler, comme le dit Laurent Le Bon, président du Centre, le lisible et visible. Il s’agira, sur des grandes thématiques de l’histoire de l’art, de l’histoire culturelle ou de l’actualité culturelle, de donner à voir à la fois des sélections documentaires, des œuvres graphiques issues des collections de la bibliothèque Kandinsky, des documents sonores issus de l’Ircam, etc., afin de dessiner un parcours inédit de petites expositions au sein même des espaces de collections de la bibliothèque.

Pour toutes questions relatives à la fermeture et au relogement de la Bpi, contactez-nous à l’adresse cooperation.partage@bpi.fr.

Publié le 12/11/2024 - CC BY-SA 4.0

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Lysistratia
Lysistratia
5 jours il y a

Bonjour,
le futur « Pôle jeunesse » qui semble amovible et partagé avec le Centre ou musée sera t-il à l’emplacement plus ou moins de l’espace Actualité présent peut-être dès 1977 et dans les années 1980 ?