À Caen, Care-Share-Dare
Par Catherine Marzin, Bibliothèque Alexis de Tocqueville

Trois axes en forme de slogan pour « réinventer la lecture publique » : l’Attention (Care), le Partage (Share) et l’Audace (Dare) à la bibliothèque Alexis de Tocqueville de la communauté urbaine de Caen la mer construite par Rem Koolhaas (agence OMA) et ouverte le 14 janvier 2017.

Réinventer la lecture publique

espace littérature-gradins
Littérature-gradins (photo Julien lanoo)

Se voulant au « croisement des publics et des idées », la bibliothèque Alexis de Tocqueville (BAT) s’est donné l’innovation comme exigence afin de renouveler l’image et les usages de la lecture publique.

Intégrant dès le départ les impératifs de communication, les trois axes définis pour cette réflexion évoquent un slogan publicitaire ou politique : Care, Share, Dare.

Le Care, c’est l’Attention apportée à tous les publics et à leur mixité présentée comme un enjeu citoyen. Les 51 heures d’ouverture hebdomadaire et l’ouverture le dimanche après-midi sont des éléments forts de cet axe ayant pour objectif d’attirer des publics éloignés de la bibliothèque.

Le Share, c’est le Partage qui se développe notamment au sein d’espaces modulaires tels que les espaces de co-working et les boîtes vidéo qui permettent le travail en atelier ou encore l’auditorium, le restaurant où les relations « horizontales » peuvent se développer entre lecteurs.

Le Dare, l’Audace, c’est l’innovation qui se traduit notamment par la bibliothèque comme média, de nouveaux rapports des personnels avec les publics ou les partenaires tels que libraires et commerces, théâtres et musées, clubs et associations. Au niveau technique, les « feuilletoirs » sont des écrans tactiles intégrés dans les rayonnages et permettant l’accès aux collections des magasins.

Complémentaire de ces axes, la bibliothèque prend un rôle moteur du développement des services au sein du réseau des bibliothèques de la communauté urbaine de Caen.

Un projet urbain

vue urbaine port de caen (photo Julien Lanoo)
Vue urbaine sur le port de Caen (photo Julien Lanoo)

La bibliothèque est située sur la presqu’ile, en rive du port au cœur de la ville. Elle s’inscrit dans un projet urbain à la jonction entre la ville ancienne et la ville en développement, dans le voisinage immédiat du Cargö (musiques actuelles), du Dôme (recherche et innovation), de l’École supérieure d’arts et médias ainsi que du nouveau Tribunal de grande instance et d’un parc. Ce maillage de bâtiments publics attractifs structure un quartier parcouru de bassins et canaux et appelé à étendre l’hypercentre de Caen.
 
 

Bâtiment outil

rezdechaussée (c) OMA
Rez-de-chaussée – la croix de saint André (© OMA)

Dans l’univers numérique, l’architecte s’assigne comme « dernière fonction […] la création d’espaces symboliques qui accueillent notre désir persistant de collectivité ». Cela rencontre la vision des bibliothécaires et des programmistes et c’est dans cet esprit qu’il avait concouru en 1989 pour le site François Mitterrand de la BnF et qu’il a construit la Seattle Public Library en 2004.
La structure du bâtiment, deux barres forme en croix de saint André, se veut une métaphore de la rencontre et du partage au cœur des pratiques culturelles. Elle organise ainsi une dialectique entre plein et vide afin de servir les nombreuses et diverses fonctions de la bibliothèque.
Son hall traversant offre une pause dans l’espace public et permet la connexion entre la ville historique et la ville nouvelle ainsi qu’avec les étages grâce à un spectaculaire escalator. C’est aussi un forum urbain, lieu de rencontres et de débats grâce à l’auditorium, la salle d’exposition, les café et café-restaurant, le kiosque. Les salles de lecture se déploient à l’étage, sur 2.500 m² d’un seul tenant, sans cloison ni poteau.
De son côté, le mobilier est défini comme « actif », faisant participer la couleur à l’alternance vide/plein de l’architecture. Les rayonnages et les bureaux se caractérisent par leur flexibilité permettant de faire évoluer la disposition de l’espace.
Le dernier niveau s’apparente à une « poutre habitée » par le jeune public ainsi que les bureaux du personnel.
Au sous-sol, le « ventre » de la bibliothèque accueille les magasins desservis par un robot de tri visible des lecteurs.    

L’organisation des espaces

Espaces de lecture (photo Julien Lanoo)
Espaces de lecture (photo Julien lanoo)

Les attentes des bibliothécaires insistaient sur l’accessibilité du bâtiment, sa modularité et la diversité des espaces, l’autonomie des usagers dans l’espace.
Le bâtiment présente 11 700 m² de planchers dont 5 800 m² ouverts au public. Outre les fonctions de rencontre du rez-de-chaussée, quatre départements Arts, Littérature, Sciences et techniques et Sciences humaines structurent les collections ainsi qu’un pôle Enfance (jusqu’à 9 ans) et une salle du patrimoine. Des fonds de référence viennent compléter cette offre grâce à un système de repérage spécifique au sein des collections : Arts du spectacle, Cultures et civilisations nordiques ainsi que le Fonds normand.
La diversité des espaces est à souligner : auditorium de 150 places, forum gradiné, espace d’exposition, salons de lecture, salles de travail en groupe, espace Enfance et un espace bébés lecteurs, kiosque presse, un café-restaurant où la consultation est permise grâce à une terrasse intérieure.
Au total, ce sont 756 places assise qui sont disponibles et 186 ordinateurs en libre service.  

Une innovation technique : les « feuilletoirs numériques »

Il s’agit de 56 écrans tactiles répartis dans les rayonnages de libre accès et qui permettent l’accès à 132 000 documents en magasins intermédiaires. Ils montrent les couvertures des ouvrages classés par thème et permettent d’éviter de passer par le catalogue. Le lecteur sait tout de suite si un ouvrage est disponible. Ce système est appelé à se généraliser sur le réseau des bibliothèques de la Caen la mer.

Infos-clés

Caen la mer 267 000 habitants
5 800 m² ouverts au public sur un total de 11 700 m² de planchers
51 heures d’ouverture hebdomadaire dont le dimanche
10 000 visiteurs par semaine
85 agents
1 million d’ouvrages
756 places dont 186 informatisées
56 feuilletoirs numériques
Architecture : AMO (Rem Koolhaas)
Programmiste : Café programmation
 

L’espace enfance, une « poutre habitée » (photoAntoine Cardi)

Publié le 18/05/2017 - CC BY-SA 4.0

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